L'EXPOSITION >

  > INDIENS DU CANADA SUR LA TOMBE DE LEUR ENFANT, 1781

INDIENS DU CANADA SUR LA TOMBE DE LEUR ENFANT, 1781

Jean-Jacques-François Le Barbier, Rouen, Musée des Beaux-Arts.

La fin du XVIIIe siècle, fortement marquée par les Lumières et notamment les thèses rousseauistes, développe à son apogée la vision du « bon sauvage », enrichie et peut-être même recréée par la découverte récente des îles océaniennes et de leurs habitants semblant vivre une forme d’âge d’or figé. L’Amérique du Nord n’échappe pas à cette représentation sur-idéalisée, au sein de laquelle l’Indien, par sa proximité à la mère Nature, apparaît dans une bonté et un pacifisme dignes de l’Eden.

C’est donc empreint de cette image positive que Jean-Jacques-François Le Barbier l’Aîné (1738-1826) peint en 1781 ce tableau devenu célèbre, précurseur de l’image romantique larmoyante qui prévaudra au début du siècle suivant : un couple pleure son enfant disparu récemment ; la mère, pressant son sein, verse son lait sur la pierre tombale.

L’imagination de Le Barbier, pourtant fertile dans ses tableaux plus tardifs n’y est ici pour rien. Le peintre s’inspire en fait du récit déjà ancien de Paul Le Jeune (1591-1664), Jésuite ayant séjourné en Nouvelle-France entre 1632 et 1649 et ayant longtemps vécu parmi les Indiens Montagnais. C’est dans son récit Relation de ce qui s’est passé en la Nouvelle-France en l’année 1633, publié en 1634, que le missionnaire cite ce bien curieux exemple de deuil.

Authentique ou non, le thème connaissait à l’époque un grand succès : quelques années plus tôt, Marmontel l’avait d’ailleurs placé dans son ouvrage fameux, les Incas ou la destruction de l’empire du Pérou (1777).