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  > Les martyrs français du Canada – Église Notre-Dame-des-Missions-du-Cygne-d’Enghien, Épinay-sur-Seine, 1931

Les martyrs français du Canada – Église Notre-Dame-des-Missions-du-Cygne-d’Enghien, Épinay-sur-Seine, 1931

C’est au cœur de la grande exposition coloniale de Paris, ouverte en 1931, non loin de la reconstitution du grand temple d’Angkor Vat, qu’avait été érigée l’église Notre-Dame-des-Missions-étrangères. Véritable lieu de culte, et non simple pavillon au décor exotique, elle accueillit de très nombreux fidèles pendant toute la durée de l’Exposition et selon la formule, était consacrée « à la gloire de la conquête missionnaire de l’Église catholique à travers les pays et les siècles ».
Sa présence au centre de cet événement n’est donc pas le moindre des paradoxes de la Troisième République, laïque et volontiers anti-cléricale dans ses actes et son discours, mais qui, tout au long de sa longue histoire n’hésita pas à associer l’église catholique à ses intérêts coloniaux et diplomatiques.
Construite comme la plupart des pavillons de l’Exposition en matériaux périssables, et destinée à disparaître après l’exposition, elle fut néanmoins sauvée grâce à une souscription nationale lancée par le maréchal Lyautey et l’amiral Lacaze et reconstruite à l’identique et en béton armé, en 1932, à Épinay-sur-Seine. Le choix de ce lieu, en banlieue, est  à mettre au compte de l’œuvre des « Chantiers du Cardinal », mis en place dès 1931 par le cardinal Verdier. Cette église (qu’il consacre d’ailleurs en 1933) est  l’une des premières réalisations de son action de reconquête spirituelle des faubourgs parisiens.

C’est un exotisme particulièrement éclectique qui caractérise ce lieu de culte dont les inspirations, à la fois asiatique (toit en pagode, façade) et subsaharienne (campanile en forme de minaret, porche), sont revêtues des effets caractéristiques du style Art Déco.
À cette occasion, Paul Tournon, l’architecte agréé de l’archevêché et maître d’œuvre, s’entoura d’une trentaine des plus célèbres artistes peintres, vitraillistes et décorateurs de l’époque, placés sous la direction d’Henri de Maistre (directeur des Ateliers d’art sacré).
Douze peintures, réalisées sur toiles marouflées montées sur les murs de refend des bas-côtés de l’église, illustrent l’histoire de l’évangélisation dans le monde. Considérant la forme particulière de la surface de travail, chaque panneau suit la même ordonnance : une carte symbolisant le lieu de mission, sur laquelle apparaissent une ou plusieurs grandes figures de l’apostolat catholique. L’un d’eux est pour nous du plus grand intérêt car consacré aux « Martyrs français du Canada ».

Réalisé par Henri de Maistre, ce panneau est entièrement occupé par une carte du cœur de la Nouvelle-France (Bassin du Saint-Laurent et Grands Lacs). Au premier plan, semblant marcher résolument vers leur destin figurent cinq missionnaires. Si le personnage debout, brandissant le crucifix, peut être logiquement associé à Jean de Brébeuf, l’identité des autres est plus incertaine et doit être choisie parmi les autres martyrs célèbres : Isaac Jogues, Gabriel Lalemant, Charles Garnier, Antoine Daniel, Noël Chabanel, René Goupil et Jean de La Lande, tous canonisés quelques mois avant la réalisation de la toile.

 

Sources : Ageorge Sylvain, 2006 ; Les Amis de Notre-Dame-des-Missions ; Latourelle, 1993 ; Observatoire du Patrimoine religieux ; Parkman, 1968 ; Simon, 2014 ; Vinel et alii, 2005.